En écho à l’exposition “Abstraction de 1940 à nos jours”, HELENE BAILLY GALLERY présente le travail de Manon Bellet.
« L’œuvre de Manon Bellet est un dénouement. Ses images ne sont pas simplement le résultat d’une prise de vue et d’un tirage, mais d’une somme d’actions complexes, d’un temps lent d’élaboration. La préparation des enduits chimiques, l’exposition répétée au soleil, le décollement, ou l’apposition d’une source de chaleur, nous n’y aurons accès que dans la légende.
Dans la série “Toxicité radieuse”, Manon Bellet éprouve l’image : une fois la photographie prise, l’artiste l’oublie au soleil. Premier péril : la lumière qui a causé l’image, maintenant l’altère et la dissout. Puis l’artiste décolle le positif de son dos négatif empli de chimie et ne garde que cela pour nous découvrir une mémoire d’image défaite. Impossible à fixer parfaitement, ces œuvres se transforment. Comme les rayons lumineux, la chimie, condition même de l’apparition de la photographie, la menace maintenant d’anéantissement. Exposé, ce travail s’altère. Ce sont des photographies du vestige, des révélations mobiles d’une réalité qui s’est retirée. Pourtant, on croit parfois pouvoir reconnaître quelque chose parmi les restes noirs et les bribes liquides.
Manon Bellet interroge la photographie : elle s’empare de procédés aussi différents que le cyanotype ou le polaroïd, ou en transpose les principes. Quand ce n’est pas la lumière qui impressionne une surface sensible, c’est une source de chaleur qui noircit des rouleaux de papiers fax comme dans les Imageries du Hasard. Apparaissent alors des paysages aléatoires et diffus. Le travail de Manon Bellet se passe de la figuration du monde et ne présente le visible qu’au terme d’une soustraction. »
Hélène Giannecchini, 2015, paru dans le magazine en ligne du Jeu de Paume.